mardi 18 juin 2013

Ce week end, alors qu'on mangeait une pizza avec A. face aux falaises d'Etretat en attendant ses amis de longue date, j'ai réalisé le bonheur que l'on a de retrouver ceux qu'on aime. De pouvoir serrer dans ses bras les personnes que l'on chérit. Et, comme à chaque fois que je pense à ceux qui me manquent, ma grand mère et tous les souvenirs d'enfance qui l'accompagnent ont resurgit. Quand j'étais en troisième un soir ma mère m'a annoncé le visage rouge de larmes que sa maman était morte, pour de vrai, alors qu'à peine un mois avant on fêtait noël tous ensemble et que je découvrais dans un coin les petits paquets qu'elle avait emballés en plus en secret pour nous faire encore plus plaisir. Je n'ai pas pleuré ce soir là ni le jour de l'enterrement où j'ai lu le texte écrit en son hommage dans l'église glaciale, ni le jour suivant où il a fallu retourner au collège et expliquer la raison de mon absence, ni celui d'après. Mais j'ai arrêté de manger la moitié des choses que j'adorais jusque là du jour au lendemain et je crois que c'est là que la première fêlure s'est faite, là profond dans mon coeur. Elle venait me chercher le mercredi au collège et je la guettais de la fenêtre de la classe. Souvent je mettais l'écharpe multicolore qu'elle m'avait tricotée, pour lui faire plaisir. Quand je dinais chez elle c'était toujours soupeàlacourgette-coquillettes-glace et ensuite un pot (entier) de crème de marron dégusté à la cuillère devant des épisodes de Charlot ou Tintin. Elle était une constante dans ma vie, la moins malade de mes quatre grands parents, celle qui ne s'écoutait pas et ne voulait jamais embêter les autres avec ses propres souffrances, et comme elle l'espérait personne ne s'est rendu compte qu'elle allait mal jusqu'au jour où. Elle n'aurait pas dû, comme si il y avait une logique, être la première à disparaitre de ma vie. Et ça fait mal de découvrir à quatorze ans que la logique s'en fout des gens qu'on aime. Quand ma mère va voir la dame avec qui elle discute je sais qu'elles parlent de cette transmission que lui a fait ma grand mère, quand j'allais voir la dame sans divan elle m'a tout de suite demandé quel métier elle exercait, et je sais, oh oui je le vois chaque jour, qu'elle imprègne mes actions, qu'elle me suit à chaque pas que je fais. Quand tout ce qui pourrait me réconforter ce sont des compotes pomme-chataigne, quand l'odeur de la lavande fait s'emballer les ascenceurs dans mon ventre, quand j'ai versé une larme salée dans la toute première soupeàlacourgette que j'ai eu plaisir à remanger depuis elle, il y a deux étés, quand je dis oui à tout le monde alors que ma tête me hurle de répondre non, quand je suis beaucoup trop exigeante avec moi même, et quand je pense aux gens que j'aime. A chaque fois. 


7 commentaires:

  1. Ouch, c'est à la fois très triste et très beau ce que tu écris. Et oui, la logique est étrangère à nos sentiments, quels qu'ils soient...
    Je t'embrasse

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  2. On puise sa force dans ces fêlures... ces petites brèches qui laissent passer tant d'amour.

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  3. Pfiou, merci d'avoir écrit ces mots-là, ces proches qui manquent tant mais qui sont là à chaque pas, ces blessures qui restent au creux de soi.

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  4. Ce texte est vraiment bien écrit. C'est rare que je sois émue par des textes de blog comme ça. Mais bien sûr j'ai immédiatement pensé à ma grand-mère adorée qui m'a tant apporté et qui a passé trop d'années à être malade.

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    1. Je n'aime pas non plus les articles de blog chouine-sur-les-grands-parents, je ne sais pas trop ce qui m'a pris de publier :D

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  5. Très beau texte qui m'a aussi rappelé ma grand-mère maternelle, partie bien trop tôt. Mais nos chers disparus continuent à vivre en nous, dans nos coeurs et dans nos gênes, d'ailleurs ma fille porte son prénom en 2ème ;-)
    Audrey

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  6. L'absence , cette terrible absence ....
    parfois je me surprend à me dire qu'il est encore là, juste une seconde qui me transperce et puis la réalité revient à moi aussi vite et je sais que plus jamais rien ne sera pareil ....
    jamais ...
    Il est certains que ta mamie te voit d'où elle est , elle veille sur toi ...
    je le pense sincèrement et ça me fait du bien de croire que rien ne s'arrete comme ça un jour <3

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