dimanche 28 juin 2015

Plage du Moulleau, un an après, deux ans après, trois ans après. Tu es venue respirer, prendre ton shoot annuel, faire et défaire ton pèlerinage aussi. L'été dernier tu écrivais sur cette même serviette ton cœur apaisé et l'espoir que le doux tienne jusqu'à l'hiver. Tu croisais les doigts tellement fort en tapant ces lettres... Évidemment que rien n´a duré. Tu le savais mais il faut croire que tu as une sacré capacité à encaisser sans flancher. Tu le savais mais t'y croyais quand même. Cœur naïf un peu crétin.
Alors voilà, tu es revenue et depuis tant a changé. Tout se casse, se remue et se reconstruit patiemment. On pourrait dire que tu as appris de cette année, que tu as grandi et que le pèlerinage a un goût de réussite. Mais ça serait encore trop facile. Tout est passé trop vite pour que tu aies eu le temps de te donner du temps. Tu as couru après les jours, attrapé en plein vol les quelques heures de vraie vie, et les mois ont passé sans toi. Tu es là mais tu n'es pas entière, comme l'impression qu'il en manque un bout. C'est donc ça que tu attendais tant ? C'est tout ce que tu en fais ? Ça ne devrait pas être un peu plus flamboyant, mirobolant, incroyable ?
Tu as l'impression que la seule chose qui pourrait te rendre à toi même c'est de rester en tailleur dans ton lit, des heures et des heures en tête à tête avec toi qui mouline, qui ne s'arrête plus, qui continue à rentabiliser chaque seconde de ta journée, dans l'espoir que ça se calme et que tu arrives de nouveau à respirer un peu. Être là, vraiment présente. 

Je monte la rue et je tourne à gauche. J'enlève mon écharpe au même carrefour, l'avant dernier. Paris, trois ans après, je marche toujours aussi vite, je suis quand même en retard de deux minutes, mais désormais je lève les yeux. Je n'ai plus peur d'être seule, je l'apprécie. Je me rends dans le même bâtiment qu'alors mais j'ai changé d'étage pour me rapprocher du rêve auquel j'ai encore le droit de m'accrocher une dizaine de jours. J'essaie de n'entendre que les rires des enfants mais je pense aux parents la nuit. Il y a des choses qui ne changent pas. 

Le blog a eu trois ans un soir de juin. J'ai terminé mon externat sur la pointe des pieds et repousse vaillamment l'idée qu'il faudra un jour passer à l'étape suivante. J'ai bu un verre avec une rencontre de l'été 2012 qui m'a dit bravo pour le chemin parcouru. La phrase est précieusement notée au coin du cœur. Il y a à côté de moi un garçon au petit nez tachederousseurisé qui me bouscule et me fais avancer, même si c'est parfois moins confortable que la tiédeur des gens sans opinion aucune. C'est avec lui que j'ai trinqué à la sangria blanche ce week-end. À nos douleurs, à nos cris, au chamboulement, à nos amours.